En mars, place au « mois de la
traduction ».
Venez assister à deux rencontres sur le
thème de la traduction
à L’Usage du monde.
jeudi 12 mars 2020 à 19h
Rencontre avec
Diane Meur & Corinna Gepner
autour de la collection Contrebande
(éditions La Contre Allée)
avec leurs ouvrages
Entre les rives &
Entre les rives
- Diane Meur
En matière de traduction, on peut légitimement
s’inquiéter de ce que deviendraient les cultures humaines et la pensée humaine,
le jour où tout échange inter-linguistique serait confié à une intelligence
artificielle. Il s’ensuivrait un cloisonnement et un repli sans précédent dans
l’histoire, une histoire qui, aussi loin que remonte la mémoire écrite, est
faite de migrations d’idées, d’usages et d’hommes, de fécondation du même par
l’autre, de transferts, de réinterprétations et de réappropriations.
[...] La traduction n’est pas seulement mon travail
alimentaire. C’est mon métier, et je suis attachée à ce mot avec tout ce qu’il
connote de soin, de savoir-faire, de travail minutieux sur la trame de l’écrit.
La traduction est mon métier, elle a forgé ma personnalité, y compris en tant
qu’autrice : j’écrirais sans doute autre chose, et autrement, si je ne passais
pas une partie de mon temps à traduire depuis deux langues étrangères, si
j’étais ancrée dans une seule langue, une seule culture, un seul territoire.
Cesser de traduire, ce serait renoncer à ce qui m’a faite telle que je suis.
Voilà pourquoi je n’ai pas hésité à accepter la
proposition de mes collègues. Dans ce volume qu’on m’offrait de rédiger, je
matérialiserais mon bilan, j’explorerais les liens entre la traduction qui (je
le maintiens) est une écriture, et l’écriture qui, à mes yeux, est un peu une
traduction. J’y évoquerais mon sentiment d’être toujours « entre les rives » –
je pense moins ici à l’image désormais classique du traducteur comme passeur,
qu’au voyageur qui a quitté les eaux territoriales de son continent d’origine,
n’est pas encore entré dans celles du continent d’en face et n’a peut-être même
pas l’intention d’y pénétrer un jour. Préférant la pleine mer, là où les eaux
appartiennent à tous et n’appartiennent à personne.
Diane
Meur est née à Bruxelles et vit
à Paris depuis 1987. Ancienne élève de l’École normale supérieure et
romancière, elle est également traductrice de l’anglais et de l’allemand. Elle
a notamment traduit Paul Nizon, Tariq Ali, Stefan Zweig, Tezer Özlü, Jan
Assmann … Ses romans sont publiés aux éditions Sabine Wespieser.
Traduire ou perdre pied
- Corinna Gepner
À mon sens, on ne traduit pas hors sol. On traduit
avec toute son histoire, individuelle et collective, avec tout ce qui nous a
précédé et tout ce qui nous entoure.
J’ ai essayé de montrer mon cheminement vers la
traduction, pour faire comprendre ce qui habite mon travail, ce qui lui donne
du sens à mes yeux, ainsi qu’ un horizon. Et la façon dont il s’ inscrit dans
un rapport aux autres qui est bien plus vaste que le simple désir de donner à
lire un texte.
Je souhaitais aussi montrer que le travail de la
traduction littéraire est tissé de doutes, d’ interrogations qui resteront
toujours sans réponse – et c’ est tant mieux. Qu’ il n’ y a pas de savoir,
juste une exploration, une expérimentation sans cesse renouvelées, un matériau
qui ne cesse de se dérober. Et c’ est justement pour cette raison que l’ on
peut travailler, inventer, et avancer.
Corinna
Gepner a exercé diverses
fonctions avant de devenir traductrice littéraire. Germaniste, elle a traduit,
entre autres, Stefan Zweig, Klaus Mann, Erich Kästner, Michael Ende, Heinrich
Steinfest, Katharina Hagena, Vea Kaiser, Christian Kracht. Elle a animé sur
Fréquence protestante, pendant une dizaine d’ années, une émission de radio
consacrée aux littératures germanophones traduites. Elle est actuellement présidente
de l’Association des traducteurs littéraires de France.
Jeudi 19 mars 2020 à 19h
Rencontre avec
Tiphaine Samoyault
autour de son livre
Traduction et violence
(éditions du Seuil)
Alors que
la traduction assistée par ordinateur est sur le point de provoquer une
mutation majeure dans nos façons de communiquer et dans notre relation aux
langues, cet essai veut renouveler la pensée de la traduction. La sortir de
l’éloge ou du consensus implique de ne plus voir en elle le seul espace de la
rencontre heureuse entre les cultures mais de la comprendre comme une opération
ambiguë, complexe, parfois négative.
Tiphaine
Samoyault étudie les histoires de violence dans lesquelles la traduction a pu
jouer un rôle (la domination coloniale, les camps d’extermination, les sociétés
d’apartheid, les régimes totalitaires), ainsi que des cas littéraires qui
illustrent les violences propres à l’espace du traduire. Mais parce que la
traduction a aussi à voir avec la justice et la justesse, avec l’imprévisibilité
de la rencontre et les transformations dans l’espace et le temps, la séparation
qu’elle entraîne peut s’inverser en réparation de la violence commise. Au-delà de la question de
la traduction, ce livre s’adresse à toutes celles et ceux qu’intéressent les
dialogues entre les cultures, les littératures et les langues, et la
possibilité politique de faire des mondes communs.
Née en 1968, Tiphaine Samoyault
est professeur en littérature comparée. Elle est conseillère éditoriale au
Seuil – où elle a récemment publié Bête de cirque (2013) – elle collabore à La
Quinzaine littéraire.
Librairie L’Usage du monde
32 rue de La Jonquière - Paris 17
01.42.26.65.68 - lusagedumonde@live.fr
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